Tous comptes faits [texte imprimé] : Tous comptes faits / Peter Robinson . - Le Livre de Poche, 2009 . - 444 p ; 17 cm. - ( Le Livre de poche) . ISBN : 978-2-253-12036-0 : 7,20 eur Mots-clés : | Conseils pratique et Divers Policier Poches Poches policiers / SF Policier en format poche Policier Policiers - Espionnages policier Romans policiers Sf | Index. décimale : | 849 | Résumé : | Pour Sheila. Les os secs qui rêvent sont amers. Ils rêvent et assombrissent notre soleil. W.B. Yeats, Ce que rêvent les os. Chapitre 1 I L'agent de police releva le cordon de sécurité et fit signe de passer à l'inspecteur divisionnaire Banks. Il était deux heures quarante-sept du matin. Tandis que l'inspecteur pénétrait dans la cour de ferme au sol raboteux, la lumière de ses phares balaya un instant les lieux. À gauche se dressait la maison, trapue, robuste, avec ses murs épais de pierre et son toit couvert de lauses tapissées de mousse. Au rez-de-chaussée comme à l'étage, les fenêtres étaient éclairées. À droite, contre un haut mur de pierre, un taillis s'étirait sur le flanc de la vallée, à l'endroit où les arbres se perdaient dans la nuit. En face se trouvait la grange. À l'intérieur, une lampe semblait fouiller les lieux ; des policiers étaient rassemblés près des portes ouvertes. Ils avaient l'air de personnages d'un film de science-fiction des années 1950, terrifiés par l'apparition d'un vaisseau spatial ou d'une créature extraterrestre. Quand Banks les rejoignit, ils s'effacèrent en silence pour le laisser passer. En entrant, il remarqua un jeune agent adossé au mur extérieur, en train de vomir sur ses grosses chaussures. À l'intérieur, on se serait cru sur un plateau de tournage. Peter Darby, le photographe de service, était occupé à faire une vidéo. La source de lumière était fixée sur le haut de sa caméra. Elle produisait un étrange effet de clair-obscur sillonné d'éclairs sinistres qui balayaient brusquement le décor de la grange. Il aurait suffi, se dit Banks, que quelqu'un se mette à crier « Action ! » pour que l'endroit s'emplisse soudain de bruits et de mouvements. Mais aucun éclat de voix n'aurait redonné vie à la forme grotesque étendue par terre. Un jeune chirurgien au teint blême, le docteur Burns, était accroupi auprès d'elle, un calepin noir à la main. À première vue, la position du corps évoqua à Banks la caricature d'un musulman en prière ' l'homme était à genoux, penché en avant, la taille cambrée, les bras tendus droit devant lui, le postérieur en l'air, la tête contre le sol, dirigée peut-être vers La Mecque ; les poings étaient refermés sur la terre battue. Banks vit briller un bouton de manchette en or portant les initiales « KAR » quand la caméra de Darby fit le point dessus. Mais le front ne touchait pas le sol. Le col de chemise maculé de sang émergeait de quelques centimètres de la veste du costume gris anthracite, puis ce n'était plus qu'une masse sombre d'os et de tissus mêlés, qui s'étalait comme une tache d'huile ' apparemment une blessure causée par un fusil de chasse. Des traînées de sang, des éclats d'os, des lambeaux de cervelle projetés sur les murs blanchis à la chaux formaient des sortes de dessins expressionnistes. Le faisceau que promenait Darby accrocha, près d'une houe rouillée, quelque chose qui ressemblait à un fragment de crâne où était restée collée une touffe de cheveux blonds. Banks sentit la bile lui remonter dans la gorge. Il avait encore dans les narines l'odeur de la poudre à canon qui lui rappelait les feux de joie nocturnes de son enfance ; mais ici, mêlée à la puanteur de l'urine, des matières fécales et aux relents fétides de chair crue, elle évoquait une mort brutale et violente. ' À quelle heure a-t-on appelé ' demanda-t-il au fonctionnaire de police qui se tenait à ses côtés. ' À une heure trente-huit, patron. L'agent Carstairs, de Relton, s'est présenté le premier sur les lieux. Il est dehors en train de vomir. Banks opina du chef. ' On connaît l'identité de la victime ' demanda-t-il. ' Susan Gay l'a vérifiée dans son portefeuille, patron. Il s'agit de Keith Rothwell. C'est bien le nom de l'homme qui habitait ici. Aucun doute là-dessus. (Il désigna la maison.) « Arkbeck Farm », ça s'appelle. ' C'est un fermier ' ' Non, patron. Un comptable. Une sorte d'homme d'affaires, en tout cas. L'un des policiers repéra un interrupteur et alluma l'ampoule nue ; cela fit ressortir davantage la vive lumière de la caméra de Darby. Dans la plupart des unités, on n'utilisait pas ce procédé, parce qu'il était difficile d'obtenir des images de bonne qualité, mais Peter Darby était un féru de technique qui n'en finissait pas de tenter des expériences. Banks porta de nouveau son attention sur la scène. La bâtisse ressemblait à une de ces anciennes granges de pierre du Yorkshire, baptisées « maisons des champs », avec double porte et fenil. À l'origine, elle devait abriter les vaches de novembre à mai et servir de grenier à fourrage, mais Rothwell semblait l'avoir transformée en garage. À droite, une BMW gris argenté, garée légèrement de biais, occupait presque la moitié de l'espace. Plus loin, contre le mur du fond, sur les nombreuses étagères métalliques, se trouvaient les outils et les produits d'entretien que l'on associe aux voitures : antigel, chiffons imbibés d'huile, tournevis, clés. Rothwell avait conservé l'aspect rural de l'autre partie du garage. Il avait même suspendu au mur de vieux instruments agricoles : une fourche à fumier, un couteau à foin, une écope et une bêche, entre autres, tous passablement rouillés. Tandis qu'il se tenait là, Banks essaya de reconstituer la scène. De toute évidence, la victime s'était mise à genoux, avait peut-être prié et imploré qu'on la laisse en vie. En tout cas, on n'avait pas l'impression qu'elle avait tenté de s'échapper. Pourquoi s'était-elle soumise si facilement ' Elle n'avait probablement pas eu grand choix, se dit l'inspecteur. En principe, on ne discute pas avec quelqu'un qui braque un fusil de chasse sur vous. Mais enfin... est-ce qu'un homme pouvait se résoudre à rester agenouillé là, à rassembler ses forces et à attendre que ses bourreaux appuient sur la détente ' Banks se retourna et sortit de la grange. Dehors, il rencontra l'inspecteur-chef Philip Richmond et l'inspecteur Susan Gay qui venaient de l'arrière de la maison. ' Il n'y a rien là-dedans, patron, pour autant que je sache, énonça Richmond, une grosse torche à la main. Susan, à ses côtés, semblait pâle dans la lueur rougeoyante qui émanait de la grange. ' a va ' lui demanda Banks. ' Maintenant oui, patron. Mais je me sentais mal, tout à l'heure. Quant à Richmond, il était égal à lui-même. Il était connu pour son sang-froid légendaire au point que Banks se demandait s'il lui arrivait d'éprouver des sentiments comme tout le monde ou s'il en était venu à ressembler à l'un de ces ordinateurs avec lesquels il passait le plus clair de son temps. ' Personne ne sait ce qui s'est passé ' interrogea Banks. ' L'agent Carstairs a échangé quelques mots avec la femme de la victime en arrivant, répondit Susan. Tout ce qu'elle a pu lui dire, c'est que deux individus les attendaient ici à leur retour, qu'ils ont fait sortir son mari et qu'ils l'ont abattu d'un coup de fusil. (Elle haussa les épaules.) Ensuite, elle a fait une crise de nerfs. Je crois qu'elle est sous calmants depuis, patron. J'ai sorti le portefeuille de la poche de la victime, ajouta Susan en brandissant un sac en plastique. Il y figure son nom qui est... ' Oui, je le connais. Avons-nous déjà désigné quelqu'un pour rassembler les pièces à conviction ' ' Non, patron, répondit Susan. Susan et Phil Richmond détournèrent le regard. Réunir ces éléments était la tâche la plus rebutante d'une enquête. Elle consistait à rechercher le maximum de preuves et à les consigner au fur et à mesure. La besogne retombait sur celui qui n'était pas dans les bonnes grâces de ses supérieurs au moment de l'affaire. ' Confiez la tâche au jeune Farnley alors, dit Banks. L'agent Farnley n'avait fait de tort à personne ni gâché aucune affaire, mais il manquait d'imagination et ses collègues du commissariat le trouvaient rasoir, avec son golf. Visiblement soulagés, Richmond et Susan se dirigèrent d'un pas nonchalant vers la grande camionnette de l'équipe de la police scientifique, qui venait de pénétrer dans la cour de ferme. Quand les experts en sortirent en se bousculant, revêtus de leur combinaison blanche, on aurait dit une délégation de scientifiques dépêchés par le gouvernement pour examiner le terrain d.. | En ligne : | http://www.librairiedialogues.fr//ws/book/9782253120360/unimarc_utf-8 |
Titre : | Tous comptes faits : Tous comptes faits | Type de document : | texte imprimé | Auteurs : | Peter Robinson | Editeur : | Le Livre de Poche | Année de publication : | 2009 | Collection : | Le Livre de poche | Importance : | 444 p | Format : | 17 cm | ISBN/ISSN/EAN : | 978-2-253-12036-0 | Prix : | 7,20 eur | Mots-clés : | Conseils pratique et Divers Policier Poches Poches policiers / SF Policier en format poche Policier Policiers - Espionnages policier Romans policiers Sf | Index. décimale : | 849 | Résumé : | Pour Sheila. Les os secs qui rêvent sont amers. Ils rêvent et assombrissent notre soleil. W.B. Yeats, Ce que rêvent les os. Chapitre 1 I L'agent de police releva le cordon de sécurité et fit signe de passer à l'inspecteur divisionnaire Banks. Il était deux heures quarante-sept du matin. Tandis que l'inspecteur pénétrait dans la cour de ferme au sol raboteux, la lumière de ses phares balaya un instant les lieux. À gauche se dressait la maison, trapue, robuste, avec ses murs épais de pierre et son toit couvert de lauses tapissées de mousse. Au rez-de-chaussée comme à l'étage, les fenêtres étaient éclairées. À droite, contre un haut mur de pierre, un taillis s'étirait sur le flanc de la vallée, à l'endroit où les arbres se perdaient dans la nuit. En face se trouvait la grange. À l'intérieur, une lampe semblait fouiller les lieux ; des policiers étaient rassemblés près des portes ouvertes. Ils avaient l'air de personnages d'un film de science-fiction des années 1950, terrifiés par l'apparition d'un vaisseau spatial ou d'une créature extraterrestre. Quand Banks les rejoignit, ils s'effacèrent en silence pour le laisser passer. En entrant, il remarqua un jeune agent adossé au mur extérieur, en train de vomir sur ses grosses chaussures. À l'intérieur, on se serait cru sur un plateau de tournage. Peter Darby, le photographe de service, était occupé à faire une vidéo. La source de lumière était fixée sur le haut de sa caméra. Elle produisait un étrange effet de clair-obscur sillonné d'éclairs sinistres qui balayaient brusquement le décor de la grange. Il aurait suffi, se dit Banks, que quelqu'un se mette à crier « Action ! » pour que l'endroit s'emplisse soudain de bruits et de mouvements. Mais aucun éclat de voix n'aurait redonné vie à la forme grotesque étendue par terre. Un jeune chirurgien au teint blême, le docteur Burns, était accroupi auprès d'elle, un calepin noir à la main. À première vue, la position du corps évoqua à Banks la caricature d'un musulman en prière ' l'homme était à genoux, penché en avant, la taille cambrée, les bras tendus droit devant lui, le postérieur en l'air, la tête contre le sol, dirigée peut-être vers La Mecque ; les poings étaient refermés sur la terre battue. Banks vit briller un bouton de manchette en or portant les initiales « KAR » quand la caméra de Darby fit le point dessus. Mais le front ne touchait pas le sol. Le col de chemise maculé de sang émergeait de quelques centimètres de la veste du costume gris anthracite, puis ce n'était plus qu'une masse sombre d'os et de tissus mêlés, qui s'étalait comme une tache d'huile ' apparemment une blessure causée par un fusil de chasse. Des traînées de sang, des éclats d'os, des lambeaux de cervelle projetés sur les murs blanchis à la chaux formaient des sortes de dessins expressionnistes. Le faisceau que promenait Darby accrocha, près d'une houe rouillée, quelque chose qui ressemblait à un fragment de crâne où était restée collée une touffe de cheveux blonds. Banks sentit la bile lui remonter dans la gorge. Il avait encore dans les narines l'odeur de la poudre à canon qui lui rappelait les feux de joie nocturnes de son enfance ; mais ici, mêlée à la puanteur de l'urine, des matières fécales et aux relents fétides de chair crue, elle évoquait une mort brutale et violente. ' À quelle heure a-t-on appelé ' demanda-t-il au fonctionnaire de police qui se tenait à ses côtés. ' À une heure trente-huit, patron. L'agent Carstairs, de Relton, s'est présenté le premier sur les lieux. Il est dehors en train de vomir. Banks opina du chef. ' On connaît l'identité de la victime ' demanda-t-il. ' Susan Gay l'a vérifiée dans son portefeuille, patron. Il s'agit de Keith Rothwell. C'est bien le nom de l'homme qui habitait ici. Aucun doute là-dessus. (Il désigna la maison.) « Arkbeck Farm », ça s'appelle. ' C'est un fermier ' ' Non, patron. Un comptable. Une sorte d'homme d'affaires, en tout cas. L'un des policiers repéra un interrupteur et alluma l'ampoule nue ; cela fit ressortir davantage la vive lumière de la caméra de Darby. Dans la plupart des unités, on n'utilisait pas ce procédé, parce qu'il était difficile d'obtenir des images de bonne qualité, mais Peter Darby était un féru de technique qui n'en finissait pas de tenter des expériences. Banks porta de nouveau son attention sur la scène. La bâtisse ressemblait à une de ces anciennes granges de pierre du Yorkshire, baptisées « maisons des champs », avec double porte et fenil. À l'origine, elle devait abriter les vaches de novembre à mai et servir de grenier à fourrage, mais Rothwell semblait l'avoir transformée en garage. À droite, une BMW gris argenté, garée légèrement de biais, occupait presque la moitié de l'espace. Plus loin, contre le mur du fond, sur les nombreuses étagères métalliques, se trouvaient les outils et les produits d'entretien que l'on associe aux voitures : antigel, chiffons imbibés d'huile, tournevis, clés. Rothwell avait conservé l'aspect rural de l'autre partie du garage. Il avait même suspendu au mur de vieux instruments agricoles : une fourche à fumier, un couteau à foin, une écope et une bêche, entre autres, tous passablement rouillés. Tandis qu'il se tenait là, Banks essaya de reconstituer la scène. De toute évidence, la victime s'était mise à genoux, avait peut-être prié et imploré qu'on la laisse en vie. En tout cas, on n'avait pas l'impression qu'elle avait tenté de s'échapper. Pourquoi s'était-elle soumise si facilement ' Elle n'avait probablement pas eu grand choix, se dit l'inspecteur. En principe, on ne discute pas avec quelqu'un qui braque un fusil de chasse sur vous. Mais enfin... est-ce qu'un homme pouvait se résoudre à rester agenouillé là, à rassembler ses forces et à attendre que ses bourreaux appuient sur la détente ' Banks se retourna et sortit de la grange. Dehors, il rencontra l'inspecteur-chef Philip Richmond et l'inspecteur Susan Gay qui venaient de l'arrière de la maison. ' Il n'y a rien là-dedans, patron, pour autant que je sache, énonça Richmond, une grosse torche à la main. Susan, à ses côtés, semblait pâle dans la lueur rougeoyante qui émanait de la grange. ' a va ' lui demanda Banks. ' Maintenant oui, patron. Mais je me sentais mal, tout à l'heure. Quant à Richmond, il était égal à lui-même. Il était connu pour son sang-froid légendaire au point que Banks se demandait s'il lui arrivait d'éprouver des sentiments comme tout le monde ou s'il en était venu à ressembler à l'un de ces ordinateurs avec lesquels il passait le plus clair de son temps. ' Personne ne sait ce qui s'est passé ' interrogea Banks. ' L'agent Carstairs a échangé quelques mots avec la femme de la victime en arrivant, répondit Susan. Tout ce qu'elle a pu lui dire, c'est que deux individus les attendaient ici à leur retour, qu'ils ont fait sortir son mari et qu'ils l'ont abattu d'un coup de fusil. (Elle haussa les épaules.) Ensuite, elle a fait une crise de nerfs. Je crois qu'elle est sous calmants depuis, patron. J'ai sorti le portefeuille de la poche de la victime, ajouta Susan en brandissant un sac en plastique. Il y figure son nom qui est... ' Oui, je le connais. Avons-nous déjà désigné quelqu'un pour rassembler les pièces à conviction ' ' Non, patron, répondit Susan. Susan et Phil Richmond détournèrent le regard. Réunir ces éléments était la tâche la plus rebutante d'une enquête. Elle consistait à rechercher le maximum de preuves et à les consigner au fur et à mesure. La besogne retombait sur celui qui n'était pas dans les bonnes grâces de ses supérieurs au moment de l'affaire. ' Confiez la tâche au jeune Farnley alors, dit Banks. L'agent Farnley n'avait fait de tort à personne ni gâché aucune affaire, mais il manquait d'imagination et ses collègues du commissariat le trouvaient rasoir, avec son golf. Visiblement soulagés, Richmond et Susan se dirigèrent d'un pas nonchalant vers la grande camionnette de l'équipe de la police scientifique, qui venait de pénétrer dans la cour de ferme. Quand les experts en sortirent en se bousculant, revêtus de leur combinaison blanche, on aurait dit une délégation de scientifiques dépêchés par le gouvernement pour examiner le terrain d.. | En ligne : | http://www.librairiedialogues.fr//ws/book/9782253120360/unimarc_utf-8 |
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